La mort de Louis XIV le 1er septembre 1715 ouvre une nouvelle période de régence, la troisième consécutive. Louis XV, alors âgé de cinq ans, succède à son arrière-grand-père. Le pouvoir est délégué à son grand oncle le duc d'Orléans jusqu'en 1723, date où Louis XV est proclamé majeur. Si le roi bénéficie au début de son règne d'une grande popularité qui lui vaut le surnom de « Bien-Aimé », la situation se dégrade rapidement vers 1750. Son règne, et celui de son successeur Louis XVI à partir de 1774, va être marqué par le déclin de l'autorité royale qui souffre d'une montée des oppositions, de la désacralisation de la personne du roi et de l'esprit critique des Lumières. Les deux rois vont se heurter à une opposition parlementaire revigorée qui va les entraver dans leurs tentatives de réforme et aboutir aux états généraux de 1789.
La méfiance de Louis XIV à l'égard de son neveu Philippe d'Orléans, futur Régent, l'avait poussé à rédiger un testament instituant un Conseil de régence entravant sa liberté d'action. Peu après son arrivée au pouvoir (1715), Philippe d'Orléans fait casser ce testament par le Parlement de Paris et restitue en échange le droit de remontrance (sans enregistrement préalable des édits) aux Parlements.
Philippe d'Orléans est un homme assez énergique, doué d'une grande intelligence, libertin accusé de murs dissolus. A l'ambiance bigote caractérisant les dernières années de Louis XIV à Versailles se substitue un esprit de frivolité. La Cour revient à Paris, aux Tuileries, qui redevient pour un temps la véritable capitale du royaume. Les jansénistes se voient à nouveau tolérés par le pouvoir : leurs opposants les plus virulents sont écartés tandis que Noailles, archevêque de Paris bienveillant envers eux, est nommé président du conseil de conscience. En revanche, le parti dévot n'obtient rien.
Pour donner satisfaction aux aristocrates contestataires, Philippe d'Orléans instaure un nouveau mode de gouvernement : la polysynodie. Sept conseils spécialisés, composés chacun d'une dizaine de membres, sont instaurés avec un membre de la haute aristocratie à la tête de chacun d'entre eux : conseil du dedans, des affaires étrangères, de la guerre, de la marine, des finances, de conscience et de commerce. Le poste de contrôleur général des finances est laissé vacant. Les Grands se voient donc à nouveau associés pleinement à l'exercice du pouvoir.
Rapidement, l'incompétence de la plupart des Grands dans les affaires administratives, les rivalités entre personnes et les querelles entre les conseils mettent à mal le système de la polysynodie. A partir de 1718, le Parlement note leur manque d'efficacité et le pouvoir royal tend à revenir au modèle précédent ; en 1719 seuls trois conseils sont conservés : la marine, les finances et le commerce. En 1720, le poste de contrôleur général des finances est de nouveau occupé par Law. En 1722, Philippe d'Orléans fait appel à son ancien précepteur, le cardinal Dubois, pour le poste de principal ministre. Cette nomination marque la fin de la période libérale de la régence.
Sur le plan financier, les années 1716 à 1720 voient l'ascension de l'Écossais John Law qui propose un nouveau système associant une banque générale, émettant du papier-monnaie convertible en métal précieux, doublé d'une compagnie commerciale par actions servant à éponger la dette de l'État. Law devient contrôleur général en 1720 mais son manque de rigueur gestionnaire et la spéculation effrénée aboutissent à la banqueroute. Il démissionne, s'enfuit de Paris pour s'exiler à Venise. Si la dette dÉtat est allégée, un grand nombre de déposants se trouvent ruinés.
Dans le même temps, les parlementaires recommencent à se montrer hostiles à la politique royale. En 1720, le régent déclare le Parlement de Paris « désobéissant et rebelle » et exile les parlementaires. En 1722, la Cour se réinstalle à Versailles ; le 25 octobre de la même année, le jeune Louis XV est couronné et sacré à Reims. Élément symptomatique : à la traditionnelle formule « Le roi te touche, Dieu te guérit » lors de la cérémonie des écrouelles est substituée la plus prudente formule « Le roi te touche, Dieu te guérisse » (l'aspect divin du monarque s'estompe). Louis XV est déclaré majeur l'année suivante, lors du lit de justice du 22 février 1723.
L'année 1723 voit la mort du régent Philippe d'Orléans et du cardinal Dubois. Après un bref passage du duc de Bourbon à la tête du gouvernement, le cardinal de Fleury, ancien précepteur du roi (âgé alors de 73 ans), est appelé pour assurer le poste de principal ministre (1726). Le cardinal, alliant fermeté et prudence, s'entoure de ministres compétents comme Le Peletier des Forts (contrôleur général des finances de 1726 à 1730) et Orry (contrôleur général des finances de 1730 à 1745). Les recettes fiscales augmentent et Orry parvient à rétablir le budget royal, qui se trouve même en excédent en 1739-1740.
Sur le plan extérieur, la prudence est de mise : Fleury s'entend avec l'Angleterre et l'Espagne et ne s'engage qu'avec réticence dans la guerre de Succession de Pologne (1733-1738), contraint de soutenir le beau-père de Louis XV. Après l'échec militaire de 1734, il négocie la paix (1735) contre l'obtention du duché de Lorraine, rattaché à la France.
La lutte contre le jansénisme reprend et se durcit : la bulle Unigenitus de 1713 (condamnant du jansénisme) est définie par une ordonnance de 1730 comme « loi de l'Église et de l'État ». Noailles, archevêque de Paris, est remplacé après son décès par Monseigneur de Vintimille du Luc (1729), très hostile à ce courant. En 1732, le cimetière Saint-Médard de Paris, lieu d'agitation des plus exaltés des jansénistes, est fermé par ordre royal.
Afin de ramener les parlementaires à l'obéissance, Louis XV fait appel à trois hommes d'État : le chancelier Maupeou, le contrôleur général Terray et le duc d'Aiguillon, qui forment ce qui sera appelé le « triumvirat ». La politique du triumvirat est caractérisée par l'abandon du programme libéral et la restauration de l'autorité royale. L'édit de Discipline de novembre 1770 interdit aux parlementaires toute liaison entre eux et toute grève. Les parlementaires réagissent en se mettant en grève. Cette nouvelle fronde parlementaire pousse Louis XV à démembrer le Parlement. Trois édits de février 1771 suppriment le Parlement de Paris et le remplacent par une nouvelle Cour accompagnée de six conseils supérieurs. La vénalité (vente) et l'hérédité des offices sont supprimées et la gratuité future de la justice introduite. A l'exception de Voltaire, partisan d'un absolutisme éclairé, les protestations sont générales chez les penseurs des Lumières. Une avalanche de libelles fait la critique de l'arbitraire royal.
La mort de Louis XV au comble de l'impopularité (1774) et l'avènement de son petit-fils Louis XVI, entraîne le retour des Parlements : soucieux de sa popularité, Louis XVI annule toutes les décisions antiparlementaires de la fin du règne de Louis XV devant un Maupeou désabusé. Louis XVI ouvre là imprudemment la « boîte de Pandore » qui causera à terme la chute de la monarchie.
Au XVIIIe siècle, le nombre de guerres allant en diminuant et l'organisation militaire de type féodal disparaissant, les avantages fiscaux dont jouissent l'aristocratie perdent leur sens. Déjà Machault en 1749 avait essayé de créer un impôt qui assujettirait tous les Français (ordres privilégiés compris) mais la virulence de l'opposition parlementaire a conduit le pouvoir royal à faire marche arrière. A partir de 1771, le contrôleur général Terray vise à établir l'équité fiscale mais la mort de Louis XV et le rappel des anciens Parlements en 1774 par le nouveau roi Louis XVI met un terme au projet.
Turgot tente de mener la réforme mais l'opposition parlementaire provoque son renvoi. Ancien banquier, Necker est appelé en 1776 pour redresser les finances du royaume alors que la France s'engage dans la guerre d'Indépendance américaine (1775-1783), qui va se révéler extrêmement coûteuse. Necker réduit les dépenses royales et a recours à un emprunt massif. La publication d'un rapport sur les finances du royaume, destinée à alerter l'opinion publique sur le coût exorbitant des pensions royales, est très mal vu à la Cour et conduit à sa démission en 1781. Son successeur Calonne poursuit la politique de restriction budgétaire, mais en 1786 les intérêts de la dette entament 50 % du budget de l'État ! Calonne reprend alors l'idée d'un vaste impôt unique reposant sur tous les corps de la nation. Afin d'éviter l'hostilité des Parlements, il soumet son projet devant une assemblée de notables, vieille institution tombée en désuétude, composée pour sa majeure partie de membres des deux premiers ordres du royaume. L'Assemblée, si elle accepte quelques mesures, s'oppose au cur de la réforme : la participation fiscale de la noblesse et du clergé.
Depuis la fin des années 1780 qui voient la critique sans concession de la politique royale et de l'absolutisme, l'insistance se fait de plus en plus forte sur une représentation de la nation. Si Vergennes, principal ministre (sans le titre) de 1774 à 1787, partisan d'un retour à l'absolutisme sans concession, rejette toute forme de consultation, Loménie de Brienne, principal ministre à partir de 1787, se montre plus ouvert. Le durcissement du conflit avec le Parlement pousse cependant à un retour aux principes autoritaires. Les Parlements se radicalisent et réclament à leur tour la convocation des états généraux.
La volonté de participation aux affaires du royaume passe aussi par les actes : en 1788, le Parlement de Grenoble est sommé par le roi de quitter la ville. Devant le refus des parlementaires, la troupe est envoyée. Mais la population prend fait et cause pour le Parlement et, du haut des maisons, lance des tuiles sur les soldats (journée des Tuiles du 7 juin 1788).
La monarchie se résout finalement à convoquer les états généraux le 8 août 1788. Les états généraux sont une assemblée de députés élus des trois ordres (clergé, noblesse, Tiers-Etat). Le rôle de cette assemblée est purement consultatif mais hautement symbolique en affermissant la légitimité du roi. Si ces états généraux sont prévus initialement pour 1792, la pression populaire pousse à leur ouverture le 1er mai 1789. La situation est alors catastrophique.
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