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L'Histoire de France, de l'Europe & du Monde

Pour certains, il incarne l’homme providentiel venu sauver l’Amérique. Pour les autres, il n’est qu’un acteur aux idées simplistes qui s’est fait élire sur sa carrière hollywoodienne plutôt que sur son programme. En tous les cas, force est de reconnaître aujourd’hui que Ronald Reagan, 40e président des États-Unis, tombeur de l’URSS, était plus intelligent que nombre de gens ne le pensaient, au point qu’il a intégré la mythologie du Parti Républicain, lequel continue à faire vivre sa mémoire.

De l’Illinois à Hollywood

Enfance

Ronald Wilson Reagan -nom complet- né le 6 février 1911 dans l’État de l’Illinois, dans la petite bourgade de Tampico. Son père est un vendeur de chaussures au penchant quelque peu alcoolique. Sa mère est une chrétienne pratiquante qui initie son jeune fils au monde du spectacle : c’est d’elle que Reagan tire son attrait pour la comédie. Ronald Reagan n’est ni catholique ni protestant : il est membre d’une branche assez tolérante du christianisme appelée Disciples du Christ. Il obtient des notes moyennes oscillant entre 10 et 12 étant jeune enfant mais confessera plus tard qu’il aimait prendre la parole : on discerne déjà celui que l’on surnommera quelques décennies plus tard le Grand Communicateur. Mais cet homme n’a en soi pas d’amis proches : Nancy Davis -qui deviendra sa femme le 4 mars 1952- semble être la seule amie que Reagan aura dans la seconde partie de sa vie. Il fréquente l’université Eurêka en septembre 1928 -cet établissement fondé en 1855 est d’ailleurs lié aux Disciples du Christ. Il a alors 17 ans et est un jeune homme sportif qui pratique la natation et le football américain : c’est la raison pour laquelle il adhère à l’équipe d’Eurêka. Son premier travail est d’être maitre-nageur. Il est affecté en Californie dans le comté d’Oakland sur la rivière Rock : y restant sept étés de suite il sera par la suite crédité du sauvetage de 77 nageurs.

Il obtient un diplôme de sociologie et d’économie. Il devient ensuite commentateur sportif en 1932 pour la radio WHO et plusieurs stations de Des Moines dans l’État de l’Iowa en tant qu’annonceur des matchs joués par l’équipe de baseball des Chicago Cubs. Il est payé cent dollars par mois. Il en restera une anecdote amusante : la communication s’étant éteinte brusquement durant un match, Ronald Reagan se débrouilla pour en commenter le déroulement de manière fictive en attendant le rétablissement de la ligne ne soit rétablie et qu’il ne puisse ensuite réadapter ses commentaires au score réel. Cependant le jeune Reagan -il n’a alors qu’une vingtaine d’années- finit par prendre le large. Bien que restant commentateur sportif Reagan effectue une audition en 1937 débouchant sur un contrat de sept ans avec la société de production Warner Brothers. Ronald Reagan est encore électeur du Parti Démocrate et est même un partisan de Franklin Delano Roosevelt et de son New Deal -dont sa famille peu aisée bénéficie.

Comédien

Reagan débute sa carrière en 1937 en jouant dans le film « Love is on the Air » : son visage respirant le charme plait d’emblée au monde du cinéma mais les films dans lesquels Reagan joue n’obtiennent pas le succès escompté. Cependant sa carrière cinématographique subit un bref coup d’accélérateur par le film « Knute Rockne, All American » dans lequel Ronald Reagan a le rôle du joueur de football américain George Gipp. Ses films les plus notables sont « Knute Rockne » en 1940, « Crimes sans châtiment » en 1942, « Bedtime for Bonzo » en 1951, le western « Quand la poudre parle » sorti en 1953 et finalement « A Bout Portant » en 1964. Ce dernier film déplaît néanmoins à Reagan qui affectionne de jouer les bons personnages : endosser le rôle d’un bandit s’oppose aux personnages stéréotypés qu’il a déjà joué par le passé. C’est le seul film où il ne jouera pas un héros positif. Reagan accepte néanmoins le rôle compte-tenu de ses soucis économiques personnels du début des années 1960. Globalement Ronald Reagan prend soin de choisir ses rôles en stratège. Ses prestations recueillent de bonnes critiques : il n’est pas l’ « acteur raté » raillé par la presse mondiale. Une fois les États-Unis pris en 1941 dans la tourmente de la Seconde Guerre Mondiale, Reagan est appelé au service militaire mais ne reste pas longtemps au front : réformé pour myopie il est affecté au service cinématographique de l’armée. Son rôle est de soutenir le moral des troupes engagées en Europe et dans le Pacifique. C’est également le 26 janvier 1940 que Reagan prend pour femme l’actrice Jane Wyman rencontrée en 1938 sur le tournage de « Brother Rat ». Ce mariage dure jusqu’en 1948. Ils auront une fille, Maureen née en 1941 et décédée en 2001 d’un cancer et adopteront un garçon, Michael, né en 1945.

Syndicaliste

Ronald Reagan est nommé troisième vice-Président du Syndicat des Acteurs en 1946. En 1947 Ronald Reagan est élu Président du Syndicat des Acteurs, poste déjà occupé temporairement en 1941, qu’il transforme en bastion anti-communiste. Il collabore avec le FBI de John Hoover et participe comme témoin à la Commission des Activités Anti-Américaines dans le but de dresser des listes noires de producteurs, de réalisateurs et de comédiens susceptibles d’entretenir une sympathie pour les idées communistes. Convoqué en 1949 devant la Commission Ronald Reagan est publiquement évasif : « Je serai franc : comme citoyen, je n’aime pas voir interdit un parti politique pour ses opinions car je crois que notre démocratie est assez forte pour résister aux excès de n’importe quelle idéologie. Néanmoins s’il est démontré que cette organisation n’est pas légitime ou est l’agent de quelque puissance étrangère, ce que le gouvernement est capable de faire selon moi, c’est une autre paire de manche ». Dans cette époque de chasse aux sorcières obsessionnelle toute accointance avec la gauche du Parti Démocrate peut apporter des ennuis : l’incarnation de Dracula en 1931 Bela Lugosi et même Charlie Chaplin feront parti des acteurs suspectés de communisme.

Constamment réélu pour sept mandat d’un an de 1947 jusqu’en 1952 Reagan recueille quelques réussites en améliorant les conditions de tournage des acteurs, mais doit lutter contre une grève d’employés communistes tentant de prendre le contrôle du syndicat. Ronald Reagan est contacté un matin par un anonyme lui disant : « On va balancer de l’acide sur ton visage pour que tu ne puisses plus jamais jouer ». Craignant pour sa vie depuis ce jour Reagan garde sur lui un pistolet. Ce moment représente aussi un tournant dans la conscience politique de Reagan, ce dernier étant dès lors persuadé que les communistes sont des personnes dangereuses et sans éthique. C’est également durant cette période qu’une jeune actrice nommée Nancy Davis et suspectée d’accointance communiste rencontre le Président de son syndicat pour obtenir une sorte de certificat de moralité. Elle sera la seconde femme de Reagan. Ce dernier réoccupera encore le poste de Président du Syndicat des Acteurs en 1959 sur invitation du comité exécutif mais finira par en démissionner car souhaitant tourner la page du syndicalisme.

Une conscience républicaine en gestation


Un acteur qui fait vendre : la General Electric

Dans les années 1950 la carrière cinématographique de Ronald Reagan bat de l’aile. Moins de rôles lui sont proposés bien qu’il ait la possibilité d’apparaitre au côté de John Wayne dans quelques documentaires et dans le show des Academy Awards en 1958. John Wayne restera l’un des amis et soutiens de Ronald Reagan -notamment pour l’élection de 1966 au poste de Gouverneur de la Californie. Ce déclin au cinéma le pousse vers le petit écran dont il est pourtant critique. Il fait la promotion de produits de la marque Boraxo tandis qu’il signe en 1954 un contrat avec l’entreprise General Electric dirigée par Ralph J. Cordiner. Ce contrat est plutôt fastueux : son salaire est d’abord de 125 000 dollars puis de 150 000 dollars par an. Ronald Reagan a obligation de faire des tournées dans les usines de General Electric au moins seize semaines par an, lui permettant de forger son endurance de futur candidat et de peaufiner son art oratoire -Reagan donnera parfois quatorze discours par jour. Ce poste lui donne aussi l’opportunité de tisser un utile réseau de relations publiques. General Electric permet aussi à Reagan d’apparaitre dans des spots publicitaires censés louer les bienfaits des produits de cette entreprise : plaque de cuisson et transistor, poste de télévision et radio portable. Ceci dans de courtes émissions ponctuées par le slogan de la compagnie « Progress is our most important product ». Ronald Reagan est désormais quasiment le porte-parole de la G.E.

Il occupe le poste de porte-parole et de présentateur jusqu’en 1962. C’est durant cet emploi de représentant que le logiciel politique de Reagan se construit : bons d’un côté et méchants de l’autre. Certes sommaire mais efficace durant la Guerre Froide. Dans ses conférences Ronald Reagan ne fait toutefois pas uniquement la promotion des produits de son entreprise mais dépasse le cadre initial de son contrat : poussé par une Nancy Davis aux opinions fortement républicaines et par sa propre expérience de Président du Syndicat des Acteurs, Ronald Reagan engage une charge frontale contre l’Etat-Providence et le socialisme, abandonnant ses anciennes opinions progressistes. Ce publicitaire prend la défense des grandes sociétés et d’une amputation drastique de la pression fiscale. Il soutient Dwight Eisenhower pour les élections présidentielles de 1952 et 1956 : son dernier soutien publiquement démocrate restera celui opéré en 1948 pour Harry Truman. Mais Reagan est encore officiellement membre du Parti Démocrate. En 1962 la General Electric lui demande de stopper ses discours politiques et de parler seulement des produits de l’entreprise, la société étant toujours soucieuse des bonnes grâces de la Maison Blanche maintenant occupée par le démocrate John F. Kennedy. Reagan conteste et est limogé. Sans profession il continue le tournage de publicités et est narrateur d’un documentaire intitulé « The Truth About Communism ».

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Quand la chance tourne

C’est pour Ronald Reagan une période d’incertitudes. Mais il est politiquement de plus en plus engagé. Il soutient en 1960 le candidat républicain Richard Nixon en prononçant plus de deux-cent discours dans les États américains. Joe Kennedy ayant appris la défection de Reagan pour le camp démocrate entreprend de lui proposer une rencontre -offre que l’ancien publicitaire décline. Pour lui le programme de la « Nouvelle Frontière » tant promue par John F. Kennedy n’est rien d’autre qu’un programme électoral accroissant la taille de l’Etat contre l’autonomie et la liberté des citoyens. En 1964 une occasion de taille lui est offerte. Incarnant l’aile dure du Parti Républicain, Barry Goldwater et son colistier Miller sont en campagne contre Johnson, successeur de John Kennedy tué l’année précédente. Or la campagne républicaine bat de l’aile : Goldwater a besoin de soutiens. Durant les années 1960 un groupe de businessmen nord-américains financent des hommes politiques afin de réduire la taille de l’État : ces derniers se regroupent autour de Ronald Reagan et lui offrent du temps d’antenne. 30 minutes pour convaincre. Reagan accepte. Il prononce en octobre 1964 un discours rediffusé que nombre d’historiens jugent comme le plus efficace de tous après le discours de la « Croix d’Or » de Bill Jennings Bryan de 1896. Ce discours a deux grandes parties : la première est une attaque frontale contre le « Big Government » de Johnson et la seconde est une charge féroce contre le communisme. Intitulé « Un Moment Pour Choisir » ce discours produit un tel effet que le camp républicain gagne un million de dollars en contributions partisanes. Reagan apparait alors plus présidentiable que Barry Goldwater alors que ces deux hommes ont pourtant les mêmes idées.

Habitant désormais en Californie Ronald Reagan est fréquemment abordé par des californiens lui recommandant de faire de la politique. S’étant considéré jusqu’ici comme un people apportant son soutien médiatique aux professionnels de la politique, Reagan accueille un jour chez lui un groupe de businessmen locaux lui proposant d’être candidat au poste de Gouverneur de la Californie. C’est l’État le plus peuplé, le plus progressiste et le plus moderne des États-Unis et les médias aiment le présenter comme la cinquième puissance économique du globe. Ronald Reagan -qui n’a jamais caché son souhait de briguer ce poste malgré ses illusions- accepte finalement la demande. Quand celui-ci brigue l’investiture républicaine pour être candidat, les États-Unis sont pris dans la tourmente : les années de l’insouciance et de la concorde nationale sont terminées depuis le meurtre de Kennedy et la Nation est saisie par la spirale infernale de la guerre au Vietnam et les émeutes raciales. Depuis Johnson le phénomène hippie prend de l’ampleur et représente la contestation étudiante de la morale puritaine et du conflit asiatique. Reagan ne porte pas dans son coeur ceux qu’il juge comme des gamins. Il décide de faire de ces contestations un des thèmes de sa campagne. Pendant ses discours Reagan aime provoquer les hippies et fait rire son auditoire : « Un hippie a les cheveux de Tarzan, pue comme Cheetah et marche comme Jane » et « Ils disent : ‘Faites l’amour, pas la guerre’. Mais le problème, c’est qu’ils ne savent faire ni l’un ni l’autre ! » Charmés par son authenticité et sa gentillesse les électeurs californiens le plébiscitent. Du côté démocrate Edmund G. Pat Brown souhaite rempiler pour un troisième mandat après avoir battu Richard Nixon en 1962 grâce au concours de John Kennedy. Cette fois-ci un autre Kennedy le soutient : Robert Kennedy prononce plusieurs discours dans cet État. De son côté Reagan bénéficie du soutien actif de l’acteur de western John Wayne et de celui d’Eisenhower. Edmund Brown rit lorsqu’on lui annonce la candidature de Reagan qu’il juge comme un acteur inexpérimenté. Mais ce dernier -certes sans doute aidé par sa notoriété considérable de comédien- finit par remporter les élections de Californie avec une avance de plus d’un million de voix. Brown lâche désabusé dans les années 1970 qu’il n’a pas assez insisté sur l’inexpérience politique de son concurrent.

Gouverneur et candidat malheureux

Gouverneur depuis déjà moins de deux ans, Reagan est approché par de hauts-responsables du Parti Républicains venus lui parler de l’élection présidentielle de 1968. Envoyant la garde nationale matraquer et tirer sur les émeutiers de Berkeley, encourageant l’escalade de la guerre du Vietnam, il apparait comme l’homme de la situation pour les conservateurs. Cependant il est encore considéré comme un extrémiste inéligible. Reagan déclare initialement ne pas être candidat pour 1968 mais change de position. Candidat contre Richard Nixon et le gouverneur de l’État de New-York Nelson Rockefeller, héritier de la richissime famille, il s’allie avec ce dernier pour former un front anti-Nixon. Mais Reagan ne remporte que la primaire de Californie et échoue de très loin. Rockefeller ne remporte que New-York. Nixon est par-conséquent de nouveau choisi comme candidat. Celui-ci choisit Spiro Agnew, le Gouverneur du Maryland, comme colistier pour la vice-Présidence. Nixon remporte de justesse l’élection de 1968 contre le démocrate Hubert Humphrey. Reagan ne se représente pas en 1972.

Il est réélu Gouverneur de la Californie en 1970 avec cependant un score moins élevé qu’en 1966. Il est obligé d’augmenter les impôts locaux par soucis budgétaire tandis qu’il s’occupe en parallèle d’un grand chantier d’adduction d’eau. Il coupe de 50% dans les dépenses de Californie notamment en réformant les programmes sociaux et réussit finalement à rétablir l’équilibre budgétaire. Il accroit aussi les opportunités professionnelles de l’État pour les minorités ethniques et les groupes sociaux défavorisés. Il embauche enfin des membres du secteur privé pour qu’ils étudient les problèmes de l’État et recherchent des solutions nouvelles. Une fois que Reagan quitte le Capitole de Sacramento en 1975 l’important déficit hérité de Pat Brown a été absorbé et un important ratio positif a été créé : près de 150 millions de dollars de surplus. Une réussite claire des mandats de Ronald Reagan -en dépit des quelques entorses aux principes du Parti Républicain- a sans doute été d’effacer le spectre de la faillite : le « San Francisco Chronicle » écrit que « nous exagérons très peu quand nous affirmons que Reagan a sauvé la Californie de la banqueroute ». Un bilan globalement positif.

Vers la Présidence

Dans le désert

Richard Nixon quitte la Maison Blanche en 1974 suite au scandale du Watergate. Spiro Agnew aura dû lui aussi démissionner pour des accusations d’évasion fiscale. Gerald Ford succède à Nixon mais Ronald Reagan ne veut pas attendre 1980 pour se représenter. Il choisit d’être candidat aux primaires républicaines de 1976. Reagan et Ford sont au coude-à-coude en nombre de délégués obtenus quand la primaire républicaine s’ouvre officiellement en août. Ford remporte toute une série de victoires au New-Hampshire, en Floride et en Illinois, mais Reagan gagne aussi quelques autres grands États tels que le Texas et la Caroline du Nord : le résultat de la Convention est donc incertain. Dans l’espoir de remporter le vote de nombreux délégués modérés du Nord, Reagan annonce choisir comme colistier le sénateur de Pennsylvanie Richard Schweiker. Mais ceci lui aliène beaucoup de conservateurs alors que peu de libéraux le rejoignent. Cette erreur stratégique permet au Président-candidat Gerald Ford de l’emporter par un écart de 110 voix. Ford demande à Reagan de prononcer un discours improvisé. Ce dernier parle du danger d’une guerre atomique avec le Bloc de l’Est en évoquant une capsule métallique enterrée dans le sol et qui porte les messages d’espoir de jeunes américains : ces paroles éclipsent celles de Gerald Ford. Une rumeur prétend qu’un murmure confus parcourt la salle. « Nous avons nominé le mauvais candidat » aurait été la parole échangée par les délégués présents dans la salle. Bien que perdant Ronald Reagan continue ses communiqués radiophoniques commencés en 1975 : il commente l’actualité et suggère des solutions. Ces interventions rapides accentuent sa popularité et préparent son programme de 1980.

En octobre 1979 Reagan effectue son dernier communiqué. En effet l’échec de Ford en 1976 face au démocrate James Earl Carter lui permet de reprendre la main. Il se déclare candidat pour les élections présidentielles de 1980. Durant les primaires républicaines Reagan dit être prêt à prendre Gerald Ford comme colistier pour la vice-Présidence : mais Ford pose des conditions parmi lesquelles reprendre Henry Kissinger au Cabinet en cas de victoire des républicains, que Reagan décline. Son principal adversaire aux primaires est Georges Herbert Walker Bush, un ancien homme d’affaires texan et ex-directeur de la CIA en 1976-1977. Bush Père est comme son fils issu de l’aristocratie financière née de l’exploitation du pétrole. Pendant un des débats de la primaire Georges H. W. Bush déclare que les idées reaganiennes en matière économique sont de l’ « économie vaudou ». Mais remarquant que Reagan a d’énormes chances de remporter la Convention, Bush choisit de rallier son équipe et est donc choisi comme second de liste. Carter est le concurrent démocrate. Mais il est affaibli par la conjonction du chômage et de la montée en puissance de l’URSS. En 1979 la révolution islamiste en Iran -qui débouche sur une prise d’otages américains- et la ruée communiste en Afghanistan finissent de créditer le ticket républicain d’un net avantage par-rapport au ticket démocrate. Durant la campagne les clichés caricaturaux abondent : Carter qualifie Reagan d’extrémiste belliciste tandis que Ronald Reagan relie directement Carter et la faillite. Cette compétition électorale reste toutefois émaillée des plaisanteries ayant fait en partie la renommée de Reagan : « La récession, c’est quand votre voisin perd son travail. La dépression, c’est quand vous perdez le vôtre. Et la reprise, c’est quand Jimmy Carter perd son travail ». Bien que commettant quelques gaffes durant la campagne électorale, Reagan rétablit son avantage sur Carter lors du débat d’octobre 1980 en ponctuant son argumentaire de plaisanteries et d’optimisme. Il termine son allocution en posant aux auditeurs cette question : « Votre situation actuelle est-elle meilleure qu’il y a quatre ans ? » Ronald Reagan -aidé par la candidature d’Anderson grappillant des suffrages de Carter- remporte l’élection présidentielle par 489 grands électeurs et 50,7% du vote populaire.

1981-1984

Reagan est élu Président mais bute sur un Sénat majoritairement démocrate. Une tentative de meurtre en 1981 dont il échappe de justesse, la balle stoppant à quelques centimètres du coeur, lui confère l’affection du peuple américain et le Président élu en profite pour engager ses premières réformes. Bien que Ronald Reagan ait surtout engagé sa campagne sur la lutte contre le communisme, il sait que son mandat sera un échec s’il ne réforme pas en profondeur l’économie. Pour Reagan celle-ci est la clé du problème : sans économie forte les États-Unis ne peuvent pas entretenir une armée assez puissante contre l’URSS. En août 1981 une épreuve de force a lieu entre la Maison Blanche et une dizaine de milliers de contrôleurs aériens. Ceux-ci font grève afin d’obtenir une hausse des salaires et la semaine de 32 heures. Or non seulement l’État leur a déjà accordé des augmentations mais une loi oubliée de 1955 interdit aux syndicats dits gouvernementaux d’appeler les agents du service public à faire grève. Presque 13 000 contrôleurs aériens membres du syndicat respectent l’ordre de grève sur un total de 15 000 membres. Reagan prononce un avertissement télévisé : « Je lis le serment solennel pris par chacun de ces employés lors de leur entrée en fonction : Je ne fais pas grève contre le gouvernement des États-Unis ou tout organisme de celui-ci, et je n’y participerai pas en tant qu’employé du gouvernement ou d’une de ses agences. C’est pour cette raison que je serai très clair : ceux qui ne se sont pas présentés au travail ce matin bafouent la loi de 1955 et s’ils ne se présentent pas au travail dans les 48 heures, ils seront licenciés ». 11 359 salariés sont limogés et remplacés temporairement par des militaires le temps de former de nouveaux agents.

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Alan Greenspan et Milton Friedman, monétariste reconnu de « Capitalisme et Liberté » sorti en 1962 dont Reagan emportait toujours un exemplaire lors de sa campagne de 1980, sont les principaux conseillers économiques de Reagan. Mais c’est Ronald Reagan qui, dans les années 1960, mit au point cette politique qu’on allait baptiser « Reaganomics » : un mélange d’État minimal recentré sur ses quatre fonctions régaliennes, de réduction drastique de la fiscalité et de dérèglementation. Cette politique allait faire entrer l’Amérique dans l’ère de l’informatique

1985-1989

Durant le premier mandat Ronald Reagan reporte la question des relations avec l’URSS. Mais en 1983 une formule fait mouche : il qualifie le Bloc de l’Est d’ « Empire du Mal ». Cette expression résume les grandes lignes de la politique étrangère nord-américaine qui, encouragée par l’alignement du Royaume-Uni dirigé par Margaret Thatcher, diabolise le pays des Soviets. Ce second mandat est une rupture dans la politique de la détente qui dominait dans les relations internationales depuis les mandats de Richard Nixon. Selon le conseiller à la sécurité nationale de 1981 à 1982 Richard Allen : « Jamais je n’avais entendu quelqu’un parler de gagner la Guerre Froide : j’avais entendu Nixon parler de gérer cette guerre mais la remporter, jamais ! » Reagan déclare : « Sur chaque continent, de l’Afghanistan au Nicaragua, nous ne devons pas briser le destin de ceux qui défient l’agression soviétique, qui soutiennent les droits qui sont les nôtres depuis notre naissance ». Reagan met en avant son soutien aux guérillas anti-marxistes dans le but de refouler la progression communiste, comme en témoigne le scandale Iran-Contra. Les États-Unis interviennent à quatre reprises de 1980 à 1989 : le Liban, l’île de Grenade afin de prévenir quelque coup d’État castriste, la Libye de Mouammar Kadhafi puis le Panama, bien que Reagan soit réticent aux opérations militaires et particulièrement celles de grande envergure. Ronald Reagan augmente le budget américain de la Défense : de 142 milliards de dollars en 1980, il s’élève jusqu’à 190 milliards en 1989 soit 33% des dépenses mondiales. Il décide de pousser la capacité des dépenses soviétiques dans leur dernier retranchement : le Président annonce officiellement en 1983 l’IDS ou projet de la Guerre des Étoiles, un défi techno-scientifique pour protéger l’Occident de toute attaque ennemie par une batterie de lasers orbitaux. Essoufflée, l’URSS tombe en 1991 tandis qu’en 1989, les républiques d’Europe centrale retrouvent leur liberté. Reagan a gagné la partie. Quittant la Maison Blanche en janvier 1989 sa grande popularité soutient Georges H. W. Bush durant l’élection présidentielle de 1988.

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