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Portrait des Gaulois


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Modifié : 06/11/2011 à 15h16


2. Tous les peuples appartenant à la race dite gallique ou galatique sont fous de guerre, irritables et prompts à en venir aux mains, du reste simples et point méchants : à la moindre excitation, ils se rassemblent en foule et courent au combat, mais cela ouvertement et sans aucune circonspection, de sorte que la ruse et l'habileté militaires viennent aisément à bout de leurs efforts. On n'a qu'à les provoquer, en effet, quand on veut, où l'on veut et pour le premier prétexte venu, on les trouve toujours prêts à accepter le défi et à braver le danger, sans autre arme même que leur force et leur audace. D'autre part, si on les prend par la persuasion, ils se laissent amener aisément à faire ce qui est utile, témoin l'application qu'ils montrent aujourd'hui même pour l'étude des lettres et de l'éloquence. Cette force dont nous parlions tout à l'heure tient en partie à la nature physique des Gaulois, qui sont tous des hommes de haute taille, mais elle provient aussi de leur grand nombre. Quant à la facilité avec laquelle ils forment ces rassemblements tumultueux, la cause en est dans leur caractère franc et généreux qui fait qu'ils sentent l'injure de leurs voisins comme la leur propre et s'en indignent avec eux. Aujourd'hui, à vrai dire, que ces peuples, asservis aux Romains, sont tenus de prendre en tout les ordres de leurs maîtres, ils vivent entre eux dans une paix profonde ; mais nous pouvons nous représenter ce qu'ils étaient anciennement par ce qu'on raconte des mœurs actuelles des Germains, car, physiquement et politiquement, les deux peuples se ressemblent et peuvent passer pour frères, sans compter qu'ils habitent des contrées limitrophes, séparées uniquement par le Rhin et ayant ensemble presque sous tous les rapports une grande analogie, si ce n'est que la Germanie est plus septentrionale, comme il est facile de le vérifier en comparant ses parties méridionale et septentrionale respectivement avec les parties méridionale et septentrionale de la Gaule. [...]

5. A leur franchise, à leur fougue naturelle les Gaulois joignent une grande légèreté et beaucoup de fanfaronnade, ainsi que la passion de la parure, car ils se couvrent de bijoux d'or, portent des colliers d'or autour du cou, des anneaux d'or autour des bras et des poignets, et leurs chefs s'habillent d'étoffes teintes de couleurs éclatantes et brochées d'or. Cette frivolité de caractère fait que la victoire rend les Gaulois insupportables d'orgueil, tandis que la défaite les consterne. Avec leurs habitudes de légèreté, ils ont cependant certaines coutumes qui dénotent quelque chose de féroce et de sauvage dans leur caractère, mais qui se retrouvent, il faut le dire, chez la plupart des nations du Nord. Celle-ci est du nombre : au sortir du combat, ils suspendent au cou de leurs chevaux les têtes des ennemis qu'ils ont tués et les rapportent avec eux pour les clouer, comme autant de trophées, aux portes de leurs maisons. Posidonius dit avoir été souvent témoin de ce spectacle, il avait été long à s'y faire, toutefois l'habitude avait fini par l'y rendre insensible. Les têtes des chefs ou personnages illustres étaient conservées dans de l'huile de cèdre et ils les montraient avec orgueil aux étrangers, refusant de les vendre même quand on voulait les leur racheter au poids de l'or. Les Romains réussirent pourtant à les faire renoncer à cette coutume barbare ainsi qu'à maintes pratiques de leurs sacrificateurs et de leurs devins qui répugnaient trop à nos mœurs : il était d'usage, par exemple, que le malheureux désigné comme victime reçût un coup de sabre à l'endroit des fausses côtes, puis l'on prédisait l'avenir d'après la nature de ses convulsions et cela en présence des Druides, vu que jamais ils n'offraient de sacrifices sans que des Druides y assistassent. On cite encore chez eux d'autres formes de sacrifices humains : tantôt, par exemple, la victime était tuée lentement à coups de flèches, tantôt ils la crucifiaient dans leurs temples, ou bien ils construisaient un mannequin colossal avec du bois et du foin, y faisaient entrer des bestiaux et des animaux de toute sorte pêle-mêle avec des hommes, puis y mettant le feu, consommaient l'holocauste.

Strabon, Géographie, IV, 2 et 5 (fin du Ier siècle av. J.-C., début du Ier siècle). Traduit par Amédée Tardieu, 1867.




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