ou les choses dignes d'�tre transmises � la post�rit� arriv�es en cette ville ou pr�s d'icy
Incendie
La nuit du 4e au 5e de ce mois, une grange que le Sr. Baric poss�doit au fonds de son jardin, derri�re l'�glise de St. Nicolas, fut enti�rement consum�e par les flames � l'heure apr�s minuit. On pr�suma que le feu y fut mis m�chamment par quelque ennemi dud[it] Baric qui se plaignoit de beaucoup d'autres vilains tours qu'on luy avoit jou� cy devant et qui tendoient tous � sa ruine. Les troupes batirent la g�n�ralle l'heure susd[ite] et s'y rendirent ainsy que la procession de St. Nicolas. S'il est vray ce qu'on soub�onnoit, cella ne d�ment pas le proverbe vulgaire � l'�gard de ceux qui peuvent dire � Toulouse et partout�:
Qui a boun bezi, a boun mayti.
Gouverneur en Languedoc
Par la Gazette de France du 1er de ce mois, article de Versailles, nous apprennons que le 27e octobre pass�, Mr. le comte d'Eu a pr�t� le serment de fid�lit� entre les mains du Roy pour le gouvernement du Languedoc, � la place de feu Mr. le prince de Dombes. Il est dit aussy que le mar�chal duc de Richelieu s'est d�mis de sa lieutenance g�n�rale de cette province et que le Roy en a dispos� en faveur du duc de Mirepoix, chevalier des ordres de sa Majest�, lieutenant g�n�ral de ses arm�es et cy devant son ambassadeur extraordinaire aupr�s du Roy d'Angleterre. Sa Majest� a nomm� le duc de Mirepoix pour commander dans la m�me province � la place du mar�chal duc de Richelieu, ce qui a �t� g�n�ralement du go�t de tout le monde.
Homme tr�s vieux
Par la m�me Gazette du 1er dud[it] article de Paris, il est dit que le nomm� Eustache Le Vasseur, compagnon bourrelier, mourut sur la parroisse St. Eustache dans la 108e ann�e de son �ge, �tant n� au mois d'avril 1648 � Dampierre en Bray, dioc�se de Rouen.
Prise de Lauriol ma�on
Le 7e de ce mois, environ la minuit, on fut saisir le nomm� Lauriol ma�on � St. Cyprien voisin voiturier du Sr. Baric, cet homme soubconn� d'avoir mis le feu � la grange de son voisin, d'en avoir goudronn� le tout et d'avoir cy devant caus� aud[it] Baric tous les embarras o� il s'�toit trouv�, fut men� en prison pour �tre ou� sur les accusations contre luy form�es, en attendant son jugement.
Naissance du comte de Provence
Par la Gazette de France du 22e de ce mois, article de Versailles, nous avons appris l'heureuse d�livrance de madame la Dauphine qui a accouch� heureusement d'un prince � qui le Roy a donn� tout d'abord le nom de comte de Provence. Il naquit le 17e de ce mois � 4 heures du matin, ce qui ayant �t� annonc� � Paris, cette capitalle par ordre du gouverneur et des �chevins en fit de r�jouissances extraordinaires, ainsy que la ville d'Aix, capitalle de la Provence, dont ce prince porte le nom, qui s'est surpass�e en cette occasion par les d�monstrations de la joye la plus vive.
Ce prince qui affermit le thr�ne, et qui remplace si heureusement monseigneur le duc d'Aquitaine que la parque nous enleva dans l'enfance, confirme ce vers de Virgile sur la f�condit� de madame la Dauphine.
Uno avilso, non deficit alter. Virg.
Tremblement de terre
Les nouvelles arriv�es dans cette ville nous ont appris que plusieurs villes en Espagne avoient �t� �branl�es par un horrible tremblement de terre qui se fit sentir dans ce pays l�, le 1er de ce mois, jour de la Toussaints � 10 heures du matin, qu'� S�ville l'�glise cath�drale, la plus belle du royaume, avoit �t� tellement �branl�e qu'on avoit pris la pr�caution de la fermer, que sa fameuse tour, apell�e � Gyralda s'�toit ouverte, que plusieurs personnes avoient �t� �cras�es.
Que le m�me tremblement s'�toit fait sentir � Cadix, que la crue de la mer a pens� la submerger, qu'une autre ville apell�e Conil est enti�rement d�truite, et qu'il avoit [illisible] dans cette rencontre 60 et dix personnes, sans compter ceux qui ont �t� engloutis dans la mer qu'on fait monter au nombre de 200 qui se trouv�rent sur la chauss�e qui communique du continent � la ville, laquelle fut emport�e par la violence des flots.
Lisbonne d�truite
De pareilles nouvelles venues du Portugal ont annonc� la funeste catastrophe de la ville de Lisbonne, capitalle de ce royaume, la plus riche, la plus belle et la plus florissante des villes de l'Europe, qui a �t� enti�rement d�truite par ce tremblement de terre et par des feux souterrains. Voicy ce que les relations qu'on en a donn� rapportent de cet �v�nem[en]t funeste.
Que le 1er novembre � 9 heures du matin, ces horribles secousses avoint renvers� la moiti� de la ville, les �glises et les palais, qu'il n'�toit rien arriv� � la famille royalle qui �toit par bonheur � Belem, que le comte de Perelada, ambassadeur d'Espagne, avoit �t� �cras� par le portail de sa maison en voulant se sauver, que le comte de Baschi, ambassadeur de France, qui demeuroit vis � vis, avoit sauv� le fils unique de ce comte infortun�, qu'il s'�toit retir� heureusement avec sa femme et ses enfans dans une m�t�rie o� il avoit re�eu tout le reste des gens de l'ambassadeur d'Espagne, que quelques jours apr�s, lorsqu'� peine ce mis�rable peuple commen�oit � revenir du trouble �trange, que ce terrible ph�nom�ne avoit imprim� dans leurs esprits, un feu souterrain �chap� des entrailles de la terre avoit achev� de d�truire et de consumer les restes infortun�s de cette mis�rable ville ainsy que quelques autres de ce royaume, comme Cascaers et Setural qui a �t� engloutie avec ses habitans.
On pr�tend qu'il a p�ri dans Lisbonne la moiti� de ses habitans qu'on fait monter � 100.000 �mes, que le tremblement de terre a eu diff�rentes reprises pendant 10 heures, et que la perte de cette ville est estim�e � dix huit cens millions de livres, et que les Anglois seuls avoient perdu dans cet accident pour plus de 200 millions, que le nonce du Pape qui se trouvoit sur les lieux dans ce tems l� avoit �crit au nonce qui �toit � Madrit qu'il y avoit eu 3 personnes �cras�es dans sa maison, et que sa lettre �toit ainsy datt�e du lieu o� existoit cy devant Lisbonne.
Ce n'est donc pas sans raison qu'on peut appliquer � cette ville infortun�e le sens de ce vers de Virgille, parlant du renversement de Troye occasionn� par les Grecs�:
Jam seges est, ubit Troja fuit. Virg. Aeneid.
Volume 4, pp. 55-61.