Le 26 mai 1794, Maximilien de Robespierre prononce à la Convention un discours où il distingue deux peuples : le peuple des « vrais » citoyens et le peuple des « factieux et des intriguants ». Ce discours marque un processus de « déréalisation » du peuple, où le peuple abstrait (le peuple révolutionnaire) coïncide de moins en moins avec le peuple concret, c'est-à-dire l'ensemble des Français. Les individus ne correspondant pas aux canons révolutionnaires sont diabolisés, pourvus de toutes les tares ; leur nature morale inférieure justifie le traitement qui les attend (la mort).
... les destinées de la République ne sont pas encore entièrement affermies et la vigilance des représentants du peuple français est plus que jamais nécessaire. J'ai parlé de la vertu du peuple, et cette vertu, attestée par toute la révolution, ne suffirait pas seule pour nous rassurer contre les factions, qui tendent sans cesse à corrompre et à déchirer la république. Pourquoi cela ? C'est qu'il y a deux peuples en France : lun est la masse des citoyens, pure, simple, altérée de la justice et amie de la liberté ; c'est ce peuple vertueux qui verse son sang pour fonder la république, qui impose aux ennemis du dedans et ébranle les trônes des tyrans ; l'autre est ce ramas d'ambitieux et d'intrigants ; c'est ce peuple babillard et charlatan, artificieux, qui se montre partout, qui persécute le patriotisme, qui s'empare des tribunes et souvent des fonctions publiques, qui abuse de l'instruction que les avantages de l'ancien régime lui ont donnée, pour tromper l'opinion publique ; c'est ce peuple de fripons, d'étrangers, de contre-révolutionnaires, d'hypocrites, qui se place entre le peuple français et ses représentants, pour tromper l'un et pour calomnier les autres, pour entraver leurs opérations, pour tourner contre le bien public les lois les plus utiles et les vérités les plus salutaires. Tant que cette race impure existera, la république sera malheureuse et précaire. C'est à vous de l'en délivrer par une énergie imposante et par un concert inaltérable. » La Convention décrète par acclamation que a le discours du citoyen Robespierre sera inséré dans le Bulletin ; il sera imprimé aussi sous la forme ordinaire et traduit dans toutes les langues. Il en sera donné six exemplaires à chaque membre de la Convention.
uvres de Robespierre, recueillies et annotées par A. Vermorel, Paris, F. Cournol, 1866, pp. 129-130.
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